UN MOT QUI TUE
La souffrance de notre corps
Est une très vieille sorcière
Toute menue et grimacière
Elle veille si je m'endors
Accroupie auprès de mon lit
Et de son chapelet de pilules
De mes lents si lents crépuscules
Elle mesure l'heure qui pâlit
Tout en couvant de l'œil gourmand
D'une très ancienne courtisane
Cachets, sirops, gouttes, tisanes,
Sur ma table de chevet
Elle marmonne dans la nuit
L'incantation maléfique
Un mot qui brûle un mot qui pique
Un mot qui ronge un mot qui cuit
Un mot qui brûle un mot qui pique
Un mot qui ronge un mot qui cuit
Un mot qui brûle un mot qui pique
Un mot qui ronge un mot qui tue !
Tout près de nous dans le silence
Elle écoute les pauvres mots
Les balbutiements les sanglots
Et le détresse et la violence
Le mal est prêt tout nu tout beau
Tenaille, élancement, morsure,
Spasme, brisure et meurtrissure
On en goûte chaque lambeau
Sans avoir besoin des efforts
D'une analyse finassière
C'est une très simple sorcière
La souffrance de notre corps
L'autre est beaucoup plus redoutable
Celle qui laboure le cœur
La fille au doux regard moqueur
Au fin sourire inimitable
Elle qui marmonne dans la nuit
L'incantation maléfique
Un mot qui brûle un mot qui pique
Un mot qui ronge un mot qui cuit
Un mot qui brûle un mot qui pique
Un mot qui ronge un mot qui cuit
Un mot qui brûle un mot qui pique
Un mot qui ronge un mot qui tue !