Cher Nino,
En août 1998, tu foutais le camp. Un départ volontaire. Un été pourri. Est-ce que depuis les médias ont révisé leur position à ton sujet ? Que dalle. Ton oeuvre, car cela en est une, continue de rester dans l’ombre, largement méconnue. Les radios balancent « Les cornichons », « Mirza », « Le Sud » »La maison près de la fontaine » et puis basta. Nino, le mal écouté, le mal-entendu.
On sous-estime toujours la paresse des gens. Pourquoi ces mêmes chansons, toujours ? Est-il si difficile d’écouter un album jusqu’au dernier titre ? Oui, certainement, puisque personne ne le faisait. Et certainement pas les critiques. Tes disques regorgent de choses inouïes, infusées d’une poésie rare. Lors de leur sortie, les journalistes s’en foutaient. Tu confectionnais tes disques en y apportant un soin d’orfèvre. Et les pourceaux faisaient la fine bouche. Un comble. On te prenait pour un rigolo toi qui, à défaut d’être noir comme tu le souhaitais, chantais le blues comme pas un et le vivait comme personne. On ne te pardonnait pas tes passages télévisuels à des heures de grande écoute. On n’admettait pas tes coups de gueule. Ta liberté dérangeait. Normal. Les hommes qui tirent sur la laisse n’admettront jamais ceux qui se baladent.
Oui, la postérité persiste à ne pas te rendre justice. Cela m’attriste. « Blanat », « Véritable Variété verdâtre », » Suite en oeuf », « Nino and Radiah », « Métronomie » sont des albums magiques. Tu exploses les formats habituels, viole les guitares électriques et fait prendre l’air aux mélodies. La communion du coeur et de l’intelligence. La sensibilité portée à l’incandescence. Ton oeuvre m’accompagne depuis tant d’années que je souhaitais, simplement, te dire merci. C’est un joli mot, merci. Presque un gros mot aujourd’hui. Tant pis.